Voltige aérienne: quatre Français au ras des pylônes

Published 15/10/2017 in Sports

Voltige aérienne: quatre Français au ras des pylônes
L’étape hongroise s’est disputée en juin à Budapest, au-dessus du Danube.

Reportage

Ce week-end à Indianapolis se déroule la dernière étape du circuit Red Bull. Rencontre avec les Français qui pratiquent cette discipline peu connue.

Pour les apercevoir et les suivre dans leurs évolutions, il faut lever les yeux et tourner la tête. Ce week-end se déroule a Indianapolis (Etats-Unis) la dernière manche du championnat du monde de voltige aérienne. L’occasion de revenir sur cette compétition assez méconnue du public français : aucune étape de ce challenge n’a lieu pour l’heure dans l’hexagone, même s’il n’est pas exclu, selon les organisateurs, qu’une étape s’y déroule dans les années à venir.

«De petits avions qui vont vite et slaloment entre des pylônes.» Voilà comment on pourrait résumer la voltige aérienne, dont l’ultime étape du circuit mondial (le Red Bull Air Race) se déroulera ce week-end à Indianapolis. Ce serait faire peu de cas des qualités qu’exigent ce sport. Car il faut une bonne dose de concentration, de sens des trajectoires pour slalomer à plus de 300 km/h championnats du monde entre des «pylônes» (en fait de gigantesques structures gonflées) de 25 m de haut, effectuer des loopings à retourner les sens et parcourir deux fois par «run», un circuit de 6 kilomètres, le tout bouclé en une cinquantaine de secondes (1). Le week-end des 16 et 17 septembre, l’épreuve se déroulait à Lausitz (Allemagne), dans un circuit habituellement réservé à la compétition automobile. Devant plus de 20 000 spectateurs – le 1er septembre, l’étape portugaise de Porto (Portugal) en avait réuni plus de 85 000 – les pilotes ont fait montre de leur talent.

Construits pour être les plus légers possible, ces avions robustes sont capables d’encaisser des forces allant jusqu’à dix fois la force de la gravité (10G). Ces appareils à hélices sont très facilement manœuvrables, capables de se cabrer à la verticale à très haute vitesse sans grand effort – une performance hors de portée des avions de chasse modernes.

Dans la catégorie «challenger cup», voilà Mélanie Astles, qui aprécie ce circuit allemand, qu’elle juge «difficile», qui demande «plus d’efforts pour gagner», avec davantage de possibilités de trajectoires. Mélanie dit «construire son puzzle» pour la course. Avant chaque run, elle a pris l’habitude de pousser un grand cri pour évacuer la pression. Mélanie a pour objectif de rejoindre l’élite – les pilotes de Master Class – dans les deux ou trois ans à venir. La pilote a fait sienne cette maxime, qu’elle énonce ainsi : «Dans le meilleur des cas je gagne, dans le pire, j’apprends à gagner.»

«Passer au plus ras»

En catégorie Master class, on retrouve François Levot. Il résume ainsi les qualités nécessaires à l’exercice. «Il faut être très opiniâtre, perfectionniste et humble. En bref, vouloir faire les choses bien.» Sur cette compétition, François explique qu’il «tape des niveaux de détails très subtils» – une majorité de concurrents se trouvait dans la même seconde à l’arrivée. Le pilote français regrette le manque de médiatisation de la discipline qui, selon lui, véhicule des valeurs de «travail, d’esprit d’équipe et de tolérance». La France n’accueille aucune étape du circuit – cela pourrait changer dans les années à venir.

Voici Mikaël – dit Mika – Brageot, habillé tout en vert dans sa combinaison Breitling. Mikaël aprécie les lieux, leur disposition concentrée avec les hangars à proximité du lieu de course, le public à touche-touche, le circuit où il y a «beaucoup d’éléments à prendre en compte, le relief, les arbres, le bitume…» Mika a décidé de tout donner, «passer au plus ras», pour rejoindre les huitièmes de finale. Il aprécie aussi cette «ambiance d’arène qui monte et chauffe». Avec son équipe de six personnes, deux ingénieurs, un mécaniciens, un coordinateur, il se positionne aujourd’hui à la dixième place du classement, et espère terminer dans les huit à la fin de la saison, après le final d’Indianapolis.

Nicolas Ivanoff est le quatrième Français de la bande. En combinaison orange, Il juge le circuit allemand complet, «avec pas mal de virages assez ouverts» et analyse ainsi les différences entre les manches. «Ce qui est difficile, c’est de reproduire la trajectoire quand elle est bonne, dans ce sport de vitesse et de précision, un peu comparable à la descente à ski.» Comme tous les concurrents, il épie les courses des autres et regarde en vidéo là où les pilotes gagnent du temps, et quelles lignes ils ont empruntée. Avant chaque «run», Nicolas se considère comme «un acteur qui va entrer en scène», avec cette appréhension qui fait que, quelques heures avant d’attaquer le vol, il n’est pas «hyper joyeux». Il trouve qu’entre les pilotes règne un respect mutuel dans une discipline somme toutes «assez difficile». Même si les pilotes sont loin de tout partager, par exemple leurs choix tactiques : «On ne va pas tout dire, il ne faut quand même pas déconner», souffle Nicolas. Le pilote souligne qu’entre les courses, lui et ses collègues ne s’entraînent pas, car il est interdit, hors compétition, de voler si bas. Lui écume le circuit depuis dix ans, ce qui en fait un vétéran de la voltige. «En plus d’être un sport, c’est une passion. En l’air, on voit les choses différemment.»

 (1) L’avion doit être à l’horizontale pour franchir les portes, sauf dans les chicanes.

On peut suivre la compétition en direct sur son site.

ParDidier Arnaud, Envoyé spécial à Lausitz (Allemagne)

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