Eco-aventurier : «Le personnage fait rêver les enfants, ils sont plus attentifs»

Published 04/12/2018 in France

Eco-aventurier : «Le personnage fait rêver les enfants, ils sont plus attentifs»
Du 1er mai au 29 novembre, l’éco-aventurier Julien Moreau a sillonné la France.

Le fil vert

Julien Moreau revient d’un triathlon géant en France durant lequel il a sensibilisé 4 000 écoliers aux enjeux de la transition écologique.

Tous les jours, retrouvez le fil vert, le rendez-vous environnement de Libération. Aujourd’hui, c’est la règle de trois : trois questions à un scientifique pour décrypter les enjeux environnementaux.

En 212 jours, il a parcouru 4550 km à vélo, 290 km à la nage, 1150 km en course à pied. Et pas seulement pour l’exploit sportif. Julien Moreau vient d’achever le plus long triathlon jamais entrepris en faveur de l’écologie. Tous les matins, celui qui se définit comme un «éco-aventurier» s’est rendu dans un établissement scolaire pour sensibiliser à la gestion de l’eau, de l’énergie, de la biodiversité, de l’alimentation ou encore des déchets. Au total, il a rencontré 4 000 élèves. Le soir, il dormait dans la nature ou chez l’habitant. Parti le 1er mai de l’Assemblée nationale, il a atteint la ligne d’arrivée le 29 novembre à la Fondation pour la nature et l’homme à Paris.

Au fil de vos aventures, vous avez réussi à faire des choses très concrètes, comme faire passer un amendement pour supprimer les bouteilles d’eau dans les cantines scolaires. Comment vous y êtes vous pris ?

Le projet a débuté en 2016. J’ai fait un tour de Bretagne à vélo où j’allais dans les écoles. J’ai rencontré 2500 élèves. Une quarantaine sont venus à Paris, à l’Assemblée nationale, pour présenter des projets de loi pour protéger la planète. Les enfants parlaient principalement de leur école, parce que c’est ce qu’ils connaissent. Trois élèves de CM1 et de CM2 ont remarqué que tous les jours, dans leur cantine scolaire, on servait des bouteilles d’eau plate en plus. Elles étaient jetées dans la poubelle noire, donc pas recyclées. Les élèves se sont dit qu’elles pouvaient simplement prendre l’eau du robinet, qui est potable. J’ai décidé de mettre toute mon énergie pour que l’initiative aboutisse. Cette année, ça a été voté en première lecture à l’Assemblée, supprimé par les sénateurs, revoté à l’Assemblée nationale, revoté en commission mixte paritaire, et même soumis à l’examen du Conseil constitutionnel. Maintenant c’est un article de loi. Cela a été une grande aventure législative. Je prenais mon petit téléphone, le numéro de l’Assemblée nationale, et je demandais à parler à tel responsable parlementaire ou à tel député. C’est du lobbying citoyen. Ça a débouché sur la présentation de l’article par Matthieu Orphelin (député LREM), malgré l’avis défavorable du gouvernement. C’est une victoire.

Après un tour de la Bretagne en paddle (#Standup4Oceans), un Jersey-Saint Malo à la nage (#Swim4ocean), un tour de la Bretagne à pied (#BZHTour) et ce triathlon géant, quelle est la prochaine étape ?

La prochaine aventure sera plus sur la mer, avec un catamaran de sport pour faire le tour du littoral français. Je vais essayer de le construire de manière écologique, remplacer les coques en plastique par des coques en fibre de lin, utiliser du bois ou du bambou, j’aimerais montrer qu’on peut faire de bateaux rapides et solides même en matière naturelle et qu’on peut sortir des produits issus du pétrole. Ce sera un tour de France, avec des rendez-vous tous les jours, sur la plage. Toujours en lien avec les enfants. L’éco-aventure, c’est en lien avec eux. Quand ils prennent conscience de la situation, ils en parlent aux parents et en général ça change les parents. Ils réagissent très positivement parce que je n’arrive pas en voiture en disant «alors aujourd’hui, le développement durable». Je suis en aventurier, avec ma gueule enfarinée, la barbe, je leur explique que j’ai 2 000 kilomètres dans les pattes. Ils accrochent sur le personnage et ça les fait rêver. Ils sont plus attentifs. Cela demande énormément d’énergie. Aujourd’hui pour intervenir dans les écoles, c’est souvent très compliqué, mais grâce à la presse c’est plus facile, j’ai plein d’invitations.

Comment vous est venue l’idée de devenir un éco-aventurier ?

Pendant mes études en école de commerce, j’ai contribué à construire une école en Inde pour des enfants intouchables, qui sont des personnes très pauvres. J’ai aussi traversé une partie du pays en VTT et fait l’ascension d’une montagne de 6 153 mètres d’altitude. Là, j’ai réalisé mon rêve d’aventure. A la fin de mes études, je me suis dit que je voulais retrouver les mêmes sensations. La protection de l’environnement a toujours été au cœur de mes initiatives. Réunir rêves et convictions, ça fait éco-aventurier. C’est un métier qui n’existe pas, qui cherche à répondre à une quête de sens et à réaliser la transition écologique. C’est quelque chose de difficile et c’est ce qui me plaît. Je n’avais pas envie de passer mon temps dans une boîte à faire des choses qui ne m’intéressent pas.

ParMargaux Lacroux

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