Comment les dinosaures se sont envolés

Published 01/02/2019 in Uncategorized

Comment les dinosaures se sont envolés
Fossile de plume d’Archaeopteryx trouvée en 1860.

Sciences

De nombreux dinosaures avaient des plumes, mais à partir de quand et comment leur ont-elles permis de voler ? Selon de nouveaux travaux, le secret réside dans leur composition moléculaire : la kératine bêta, remplaçant la kératine alpha, a rendu les plumes légères et flexibles.

Depuis des découvertes fossiles dans les années 90, on sait que certains dinosaures portaient des plumes. Pour quoi faire ? La panoplie d’usages est très large… Pour Sinosauropteryx par exemple, un petit théropode bipède décrit pour la première fois en 1996, les plumes, très primitives, servaient probablement à se camoufler dans le désert chinois où il chassait il y a 130 à 120 millions d’années.

Vue d’artiste de Sinosauropteryx. (Dessin Dinoguy2, CC BY SA)

Pour d’autres espèces de dinosaures – voire de ptérosaures –, les hypothèses vont bon train : le plumage servait peut-être d’ornement, voire d’isolant thermique. «Les plumes de ces spécimens, semblables à de simples filaments, étaient très différentes de celles des oiseaux modernes, explique à Libération la paléontologue américaine Mary Schweitzer, célèbre pour avoir retrouvé de l’hémoglobine sur un fossile de T.rex, mais beaucoup d’entre elles étaient identiques aux plumes faites pour voler avec un rachis central composé de barbes et de barbules.»

Mais on sait que ces animaux plumés, longtemps représentés à tort comme de gros lézards, étaient incapables de voler… Du moins jusqu’aux premiers dinosaures oiseaux reconnus comme tels. C’est le cas du bien nommé Archéoptéryx (littéralement «vieille plume»), dont le premier fossile, daté de 150 millions d’années, a fait couler beaucoup d’encre depuis sa découverte en Allemagne, au milieu du XIXe siècle. D’où cette question, qui taraude bon nombre de paléontologues : quand et comment, du point de vue de l’évolution, les dinosaures plumés se sont-ils envolés ?

Ce fossile d’Anchiornis révèle que les plumes de dinosaures avaient certaines (mais pas toutes les) caractéristiques moléculaires des plumes d’oiseaux modernes. (Photo Pan Yanhong)

Composition moléculaire

Mary Schweitzer et son confrère chinois Pan Yanhong pourraient avoir un début de réponse. Leurs derniers travaux, rendus publics cette semaine dans la revue Proceedings of The National Academy of Science, indiquent en effet que la clé du mystère réside dans la composition moléculaire des plumes des animaux passés et présents. Et notamment en kératine bêta, une protéine synthétisée par les oiseaux modernes (mais aussi les reptiles) pour former les tissus tégumentaires (en contact avec l’extérieur) très légers et flexibles que sont les plumes.

Pour parvenir à ces conclusions, et sans rentrer dans la complexité de leur expérience, les chercheurs ont donc testé la présence de cette molécule dans les fossiles de cinq espèces plumées ayant vécu au Jurassique et au Crétacé. Parmi ces animaux, c’est un dinosaure de la taille d’un corbeau, Anchiornis, qui a retenu leur intérêt. Car ce tout petit dino non aviaire, récemment découvert en Chine dans la province du Liaoning, était recouvert de plumes 10 millions d’années avant les premiers oiseaux. Analysées au microscope électronique, celles-ci ont cependant révélé une composition intermédiaire, c’est-à-dire proche de celles des oiseaux modernes grâce à la présence de kératine bêta, mais contenant aussi de la kératine alpha.

Vue d’artiste d’un Anchiornis. (Dessin Matt Martyniuk, CC BY)

Cette autre protéine est absente dans la formation des plumes modernes, bien que nécessaire à la formation des autres tissus comme les écailles. Selon ces résultats, la disparition de la kératine alpha combinée à l’apparition de la kératine bêta dans la structure des plumes leur aurait donc permis d’être moins rigides, une condition nécessaire à l’envol des animaux ailés. «Les oiseaux modernes ne produisent pas de kératine alpha pour leurs plumes matures, mais pour leurs plumes embryonnaires c’est le cas, conclut Mary Schweitzer. La prochaine étape sera de savoir comment la kératine alpha a été perdue dans la structure des plumes des oiseaux.»

ParFlorian Bardou

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