Le son du jour #260 : naturel comme Sign Libra

Published 16/04/2018 in Musique

Le son du jour #260 : naturel comme Sign Libra
La Lettone Agata Melnikova, alias Sign Libra.

Nature et découvertes

Pour son premier disque paru sur le label parisien Antinote, la compositrice lettone Agata Melnikova s’inspire des documentaires animaliers qu’on regarde tard, la nuit, parce qu’on est ivre ou que le sommeil tarde à arriver.

Il n’y a pas de sotte chimère : ainsi pourrait-on résumer ce beau (premier) disque de la compositrice lettone Agata Melnikova, dont les premières notes et ambiances sont apparues dans son esprit alors qu’elle somnolait devant un documentaire animalier de la BBC.

Comme le Carnaval des animaux de Saint-Saëns avant lui, Closer to the Equator («plus près de l’Equateur») est une suite musicale dont chaque partie est vouée à une espace animale ou végétale, des diopsidae («famille d’insectes diptères brachycères») aux Victoria d’Amazonie, une espèce de nénuphar géant dont les fleurs peuvent atteindre les 3 mètres de diamètre.

Les maniaques de musique rare savent peut-être que les docus nature de la BBC, comme ceux de la série Life on Earth, ont donné lieu à des expérimentations soniques passionnantes au point de faire l’objet d’éditions en beau disque vinyle. Melnikova pourtant a l’air de plutôt s’intéresser au tout-venant humble et utilitaire de la bande-son, souvent façonnée à la maison par des anonymes avec un budget limité (et quelques synthétiseurs génériques aux sons d’usine prêts à illustrer vite fait bien fait tout et n’importe quoi).

Gouttes d’eau sur pare-brise brûlant

Fétichiste, tels quelques contemporains influents de l’underground électronique comme Oneohtrix Point Never ou James Ferraro, d’une esthétique longtemps honnie par la mélomanie – celle pleine de gouttes d’eau sur pare-brise brûlant, de chœurs de poupées et autres flûtes de pan en plastique qu’on associe naturellement à Windows 95 et 98 –, la Lettone s’en donne à cœur joie sur ses musiques de reportages imaginaires, d’autant plus engageantes qu’elles sont crédibles.

Autrement dit, phasmes et tigres s’agitent, chassent et copulent devant nos yeux comme si on y était, à 2 heures du matin, un peu ivre et/ou mélancolique, hagard mais satisfait, devant l’écran plat d’une chambre d’hôtel de Niort ou Kuala Lumpur. Il ne manque, pour que les images apparaissent tout à fait devant le troisième œil, que la voix off d’un comédien de seconde zone – le bénéfice de cette absence permettant en contrepartie de danser sur les moments les plus entêtants, en club ou sur une scène, comme l’ont fait les danseurs du ballet contemporain de l’Opéra national letton de Riga en 2015 dans une chorégraphie de Milana Komarova

Closer to the Equator vient de sortir chez Antinote.  

ParOlivier Lamm

Print article

Leave a Reply

Please complete required fields