Aulnay : l’incompréhensible silence de la gauche

Published 07/02/2017 in France

Aulnay : l’incompréhensible silence de la gauche
Lors d’une manifestation contre les violences policières à Aulnay-sous-Bois, lundi.
Billet

De la mort d’Adama Traoré à l’interpellation du jeune Théo, le pouvoir préfère éviter de condamner les violences policières.

«J’étais de trois quarts, je voyais ce qu’il faisait derrière moi. Je l’ai vu avec sa matraque : il me l’a enfoncée dans les fesses, volontairement. Je suis tombé sur le ventre, j’avais plus de force, on dirait que mon corps m’avait laissé. Puis, ils m’ont mis les menottes et m’ont dit : “Assieds-toi maintenant”. Je leur ai dit : “Je ne peux pas m’asseoir, je sens plus mes fesses”.» Théo, 22 ans, blessé lors de son interpellation, à Aulnay-sous-Bois, a lâché ses premiers mots ce lundi. C’était sur BFMTV. Il a également évoqué des «coups», des «crachats», des «insultes». Aujourd’hui, sa version n’est pas remise en cause. Tout le monde l’écoute, note. Tout le monde est sous le choc.

Pour cause, la scène a été filmée par un témoin. Puis diffusée. Elle a permis à la justice de se saisir des bandes-vidéo de la municipalité et d’ouvrir une enquête. Dimanche soir, un policier a été mis en examen pour viol et trois de ses collègues pour violences volontaires en réunion. On imagine la même scène sans témoin, sans image : sa parole contre des paroles. Une suite incertaine. Une situation dingue. On ne généralise pas, mais les plaintes contre les violences policières ne datent pas d’hier. Chaque quartier a ses archives : «une bouche cassée», «un nez pété», «des coups de matraque». Pas facile pour un petit gars de se débattre face à des institutions. Les victoires judiciaires, en faveur des plaignants, sont trop rares face aux nombreuses procédures.

Pourtant, lors de son arrivée au pouvoir, la gauche avait promis l’égalité. La discrétion des autorités est incompréhensible. La mort, cet été, du jeune Adama Traoré, à Beaumont-sur-Oise, nous le rappelle tous les jours. Ce week-end, après la parution de la vidéo de Théo, très peu de réactions. Il y a quelques jours, la loi égalité citoyenneté a été promulguée dans l’anonymat. On y trouve les caméras piétons : les policiers seront équipés de GoPro, censées améliorer la confiance entre forces de l’ordre et population. Cette mesure remplace celle, enterrée, des récépissés. En attendant l’arrivée des caméras piétons et tester son efficacité, il n’y a qu’une chose à faire : filmer. On peut appeler ça la «caméra citoyenne». C’est la seule arme, aujourd’hui, en France pour un jeune de prouver son agression sans débat et combattre les discriminations. Triste mais réel.

ParRachid Laïreche

Print article

Leave a Reply

Please complete required fields