Les Néandertaliens prenaient-ils de l’aspirine ?

Published 15/03/2017 in Sciences

Les Néandertaliens prenaient-ils de l’aspirine ?
Reconstitution contemporaine du visage d’un Néandertalien, exposée dans un musée à Krapina, en Croatie.

Migraine

Longtemps avant le retour en force de l’agriculture bio et de l’automédication, les Néandertaliens, plutôt végétariens, mangeaient de l’écorce de peuplier pour se soigner.

Quel est l’enjeu ?

Il y a peu encore, l’histoire de l’aspirine n’avait pas plus de 4 000 ans environ. A l’époque, les anciens Egyptiens, puis les anciens Grecs avec Hippocrate, préparent l’écorce de saule en décoction pour soulager leurs douleurs. Mais une étude publiée dans la revue Nature va contraindre les historiens de la médecine à reculer le curseur de plus de… 40 000 ans. Depuis quelques mois, des chercheurs étudient des fossiles retrouvés sur les sites rupestres de Spy, en Belgique, et de El Sidrón, au nord-est de l’Espagne pour mieux comprendre le mode de vie et les habitudes alimentaires des Néandertaliens. Et loin de se comporter comme les brutes épaisses que nous pourrions imaginer, les scientifiques ont révélé qu’ils étaient plutôt végétariens, et fins connaisseurs des plantes médicinales.

Comment les chercheurs ont-ils procédé ?

L’équipe internationale composée notamment de scientifiques du Centre australien pour l’ADN ancien (Acad) de l’Université d’Adélaïde a analysé et comparé des échantillons de plaque dentaire de quatre Néandertaliens âgés de 42 000 à 50 000 ans. A leur grande surprise, les chercheurs ont découvert que l’un de ces quatre individus souffrait d’un abcès dentaire très douloureux et qu’il se soignait en mangeant de l’écorce de peuplier, un arbre qui contient de l’acide salicylique, le principe actif de l’aspirine. Plus surprenant encore, ils ont retrouvé du Penicillium sur ses dents… une moisissure à la base de la célèbre pénicilline.

Qu’ont-ils découvert et à quoi ça sert ?

Les résultats de l’étude suggèrent que les Néandertaliens développaient un comportement bien plus complexe que ce que nos représentations actuelles laissent penser. «Apparemment, les Néandertaliens possédaient une bonne connaissance des plantes médicinales et de leurs propriétés anti-inflammatoires et analgésiques», explique Alan Cooper, directeur de l’Acad. Mais pour lui, l’utilisation d’antibiotiques 40 000 ans avant la découverte de la pénicilline par Alexander Flemming en 1923 serait plus surprenante, la moisissure antibiotique s’étant peut-être retrouvée là par hasard lors de la consommation d’un fruit partiellement moisi. D’autant qu’elle n’a été retrouvée que sur un seul individu. Trop peu pour conclure à l’utilisation volontaire d’un antibiotique. L’utilisation d’antibiotiques remonte néanmoins, comme l’aspirine, à plusieurs milliers d’années. On se servait déjà des pouvoirs curatifs du Penicillium dans l’Antiquité en appliquant des peaux de fruits moisis sur les plaies. Plus étonnant, les anciens Nubiens qui peuplaient les bords du Nil il y a quelque 2 000 ans luttaient contre les infections grâce à la tétracycline produite par une bactérie qui proliférait lors de la fermentation du grain utilisé pour la bière. 

ParGuillaume Garvanese

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