Comment faire une comète en forme de cacahuète

Published 09/03/2018 in Sciences

Comment faire une comète en forme de cacahuète
La comète Churyumov-Gerasimenko («Tchouri») photographiée par la sonde européenne Rosetta le 7 juillet 2015.

Astronomie

On pensait jusqu’à aujourd’hui que la comète «Tchouri», visitée par la sonde Rosetta en 2014, devait sa forme à la lente fusion de ses deux lobes au début du système solaire. Une nouvelle étude montre qu’elle a pu, au contraire, se former très rapidement et très récemment dans les débris d’une violente collision d’astéroïdes.

La comète Tchouri (de son vrai nom 67P/Tchourioumov-Guérassimenko) a surpris tout le monde quand elle s’est dévoilée en photo pour la première fois en 2014, sous l’objectif de la sonde Rosetta : elle a la forme d’un canard en plastique, avec deux lobes, un gros corps et une «tête» qu’on dirait reliés par un cou. Comment a-t-elle acquis cette drôle de silhouette ? Depuis bientôt quatre ans, les astronomes tentent de modéliser sa formation par ordinateur. Selon l’hypothèse la plus plausible jusqu’à aujourd’hui, les deux lobes de la comète se font formés indépendamment puis ils ont lentement fusionné, et ceci à une époque précoce dans l’histoire du système solaire, il y a plus de 4 milliards d’années – ce qui faisait de Tchouri une très vieille comète.

Et si on avait tout faux ? L’équipe internationale d’astronomes coordonnée par Patrick Michel, du laboratoire Lagrange sur la côte d’Azur, publie ce lundi dans Nature Astronomy une proposition radicalement différente : «Nous montrons ici, par une simulation numérique, que 67P et d’autres comètes allongées ou bilobées peuvent être formées à la suite de collisions catastrophiques entre de plus gros corps.»

La collision de deux astéroïdes ou comètes résulte en une explosion de matière – gros fragments, petits morceaux et beaucoup de poussière. Mais cette dernière se disperse finalement peu. «Seule une faible partie de la matière est pulvérisée à haute vitesse, réduite à l’état de poussière, résume le CNRS. A l’opposé du point d’impact, les matériaux riches en éléments volatils peuvent résister, et être éjectés à des vitesses relatives suffisamment faibles pour s’attirer et se réaccumuler en formant de nombreux petits corps.» Les fragments de comète s’agglutinent très rapidement, en «quelques jours, voire quelques heures».

Et «comme ce processus peut se produire à n’importe quelle époque de l’histoire de notre système solaire, de ses débuts aux jours présents, ces objets ne sont pas forcément anciens», estiment les astronomes dans leur étude. L’idée d’une Tchouri jeune est plus facilement explicable que celle d’une comète ayant survécu des milliards d’années à tous les risques de collision avec les cailloux qui croisent son chemin : «Il est très difficile de faire survivre une comète pendant 4 milliards d’années dans la ceinture de Kuiper située au-delà de Neptune et dont Tchouri est issue, avec les modèles standards d’évolution collisionnelle de cette ceinture», explique Patrick Michel, cosignataire de l’étude, à Sciences et Avenir.

La comète Tchouri en septembre 2014. (Photo ESA/Rosetta/NAVCAM, CC BY-SA IGO 3.0)

ParCamille Gévaudan

Print article

Leave a Reply

Please complete required fields