Vu de l’étranger : «Paris, sois en sécurité !»

Published 02/12/2018 in Planète

Vu de l’étranger : «Paris, sois en sécurité !»
A Paris, le 1er décembre 2018, pendant la manifestation des «gilets jaunes».

Gilets jaunes

Les émeutes violentes à Paris ont attiré l’attention des réseaux sociaux et des médias étrangers dont certains ont dépêché des reporters et déployé des moyens importants pour suivre la manifestation des «gilets jaunes».

Les images des Champs-Elysées, de l’Arc de triomphe, du Trocadéro ou de la rue de Rivoli enflammés et vandalisés ont envahi les écrans du monde entier depuis la manifestation des «gilets jaunes» ce samedi. Elles ont suscité la stupéfaction des téléspectateurs qui regardaient, il y a trois semaines encore, ces mêmes sites emblématiques de Paris parés pour l’accueil des dirigeants du monde entier invités à célébrer le centenaire de l’armistice de la Grande Guerre, le 11 novembre. «Salamtek Baris !», («Paris, sois en sécurité !»), l’expression arabe traditionnellement utilisée pour dire sa sympathie à un malade est reprise sur les réseaux sociaux par plusieurs internautes.

Commentant la photo de la statue de Marianne au visage défoncé dans le musée de l’Arc de triomphe, un Algérien écrit : «Comme quoi, il n’y a pas que les barbus qui s’en prennent aux statues», alors qu’un autre internaute évoque une «daechisation» de la protestation.

Tandis que les correspondants de tous les médias étrangers à Paris relayaient en direct les informations sur les violences samedi, les chaînes russes ont été les plus mobilisées. «Douze membres de nos équipes ont été blessés pendant la couverture des événements», a fait savoir RT (Russia Today) France. La chaîne avait mis des moyens considérables sur le terrain, avec des caméras disposées en plusieurs points névralgiques de la capitale. Ses images d’un CRS isolé attaqué par des gilets jaunes près de la place de l’Etoile ont même été reprises dans le journal de 20 heures de France 2 samedi, avec le logo RT.

«L’avenir de Macron en péril»

«Les violences sont une aubaine pour le gouvernement», lit-on sur le site de la chaîne russe, qui évoque «une stratégie de communication politique très classique, sur les débordements de quelques-uns plutôt que sur les revendications politiques de la majorité». L’article conclut sur les casseurs «simultanément accusés d’être d’extrême droite et d’extrême gauche […] un prétexte tout trouvé pour l’exécutif».

Quant au site russe Sputnik, connu pour sa diffusion d’informations peu fiables, il titre «Troisième mort en marge des gilets jaunes», à propos de l’automobiliste tué dans un carambolage à Arles, dû à un barrage des gilets jaunes. Sputnik ne précise pas quels sont les deux morts précédemment comptabilisés.

Une tradition très française des manifestations violentes est mise en avant par plusieurs commentateurs étrangers, anglo-saxons en particulier. Ainsi, l’analyste David Andelman, sur CNN, remonte à la Révolution française avant de rappeler Mai 68. Mais alors que l’embrasement, il y a cinquante ans, avait finalement bénéficié au général de Gaulle, «le mouvement actuel met en péril l’avenir de Macron», considère le commentateur américain.

Théories du complot

Qualifié par un site d’information libanais d’«émeutes du croissant», le mouvement des gilets jaunes rappelle aux observateurs arabes les émeutes du pain qui ont eu lieu dans le passé, notamment en Egypte ou au Maroc. Les violences du week-end ont également fait ressurgir les théories du complot dont le monde arabe est traditionnellement friand. Le gouvernement et les services de renseignement français sont soupçonnés d’avoir ouvert la voie ou manipulé les casseurs pour discréditer le mouvement.

Tandis que la plupart les réfugiés syriens en France s’étonnaient de la «clémence» des forces de l’ordre françaises face aux manifestants violents, une angoisse pointait chez certains. «Papa, on va aller où maintenant ?», a demandé Ramy, 9 ans en voyant les images des flammes et des affrontements à la télévision. La famille, installée depuis deux ans en banlieue parisienne, avait fui Alep assiégé, puis la Turquie après le coup d’Etat manqué de l’été 2016.

ParHala Kodmani

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